Avant de devenir parent, le terme casser sa pipe* te faisait rigoler. Maintenant, impossible d’accepter l’idée de passer l’arme à gauche* : tu as dit à la babysitter que tu rentrerais à 23h. Pour alléger tes angoisses de parent mortel, il y a un exercice auquel tu peux te prêter facilement, que tu sois en couple ou parent célibataire. Cet exercice, c’est ton testament.
*Pour dédramatiser le traitement de ce lourd sujet, nous avons décidé de remettre au goût du jour un maximum d’expressions de nos régions pour évoquer la… euh… le repos éternel.
C’est prouvé : être parent change ta perception de la grande faucheuse
Vous voilà dans l’avion, prêts à vous envoler pour de petites vacances sans enfants. Soudain, ta moitié t’agrippe le bras et te dit d’une petite voix : « Imagine si l’avion s’écrase et qu’on claque tous les deux ? Que deviendront les enfants ? ». Passée la première réaction, qui est de lui rire au nez et de te resservir de jus de tomate, l’angoisse te saisit soudain aux entrailles. Hors de question que tes enfants soient élevés par des personnes que tu n’as pas adoubées !
Une étude sociologique menée en 2014 constate que les couples d’adultes sans enfants craignent davantage de faire le grand saut que les couples avec enfants. Pourtant, de nombreux parents témoignent d’une plus grande inquiétude à l’idée de rejoindre les verts pâturages depuis qu’ils ont des enfants en bas-âge. Comment réconcilier ces 2 informations ?
Peut-être que, pour les jeunes parents, la crainte d’une disparition prématurée exprime en réalité l’angoisse de laisser ses enfants dans une situation émotionnelle et matérielle difficile. L’inquiétude de son trépas à soi est passée au second plan. Tu te sacrifierais d’ailleurs probablement pour sauver la vie de ton enfant. Tu as donc moins peur de ta propre fin, mais qu’est-ce que ça te rend triste de l’imaginer…
Testament de parent, étape 1 : qui va s’occuper des enfants ?
C’est LA question : la tutelle. Si le ou les parents payent leur dette à Dame Nature en même temps, qui élèvera les enfants encore mineurs ? En d’autres termes, qui seront leurs tuteurs légaux ?
Voici quelques informations utiles pour comprendre la démarche :
- Le choix des parrains ou marraines n’a aucune valeur juridique. Ce qui ne t’empêche pas bien sûr de désigner l’un ou l’autre comme tuteur légal dans ton testament.
- Si les parents rendent l’âme sans avoir spécifié par écrit leurs souhaits de tutelle, le conseil de famille se réunira en concertation pour désigner la ou les personnes les plus aptes à jouer le rôle de tuteur(s) pour tes enfants. Ce conseil de famille est formé par 4 à 6 membres de la famille ou personnes qualifiées, nommées par le ou la juge chargé.e de l’affaire. Attention, c’est ici que des tensions risquent de survenir en cas de désaccord ! Le ou la juge peut également réfuter la décision du conseil de famille si elle semble contraire à l’intérêt de l’enfant.
Conclusion ? Pour éviter ce genre de situation, tu as tout intérêt à désigner par écrit le ou les tuteurs de tes enfants, dès aujourd’hui. Il est même possible de dresser une liste de choix par ordre de priorité. C’est la première raison d’être de ton testament.
Un conseil : Demande leur accord aux personnes concernées, même si elles auront tout à fait le droit de refuser la tutelle le cas échéant. Cela ne crée pas une obligation légale pour ces personnes mais ton choix, lui, s’imposera au conseil de famille pour éviter que tout le monde ne parte en vrille. Rassurant, non ?
Testament de parent, étape 2 : comment prévoir ta succession pour qu’elle bénéficie à tes enfants ?
Le sujet est complexe car il dépend de multiples facteurs, dont :
- ton état civil (marié, pacsé, concubin, divorcé, célibataire, etc.) ;
- Ce que dit ton contrat de mariage sur le partage des biens ;
- Si tu as eu des enfants d’une précédente union, etc. etc.
Simplifions le débat. En tant que parent dévasté par l’idée de laisser tes enfants dans le besoin, tu veux t’assurer que :
- Ta compagne ou ton compagnon, le cas échéant, puisse se servir de tes possessions terrestres pour assurer le bien-être des enfants ;
- Ce soit bien tes enfants qui reçoivent l’ensemble de ton héritage et non pas ton dernier vieux cousin.
Tout cela doit être précisé dans ton testament par écrit en tenant compte de ta situation légale. Prenons trois exemples courants.
Couple pacsé
Le ou la partenaire de pacs n’a aucun droit sur la succession. Pour créer ce droit, il faut obligatoirement rédiger… un testament ! La loi protège l’enfant via la notion d’héritier réservataire (ce qui signifie qu’on ne peut pas déshériter son enfant sous un certain seuil). Mais si tu manges les pissenlits par la racine sans avoir spécifié que tu souhaites léguer tes biens à ton ou ta partenaire, il ou elle risque de devoir élever vos enfants sans l’aide de la succession… qui sera partie dans la poche du membre de la famille le plus proche !
Couple marié
Là c’est plus simple car le conjoint survivant, comme on l’appelle poétiquement, possède des droits directs à la succession. Ça se complique un peu s’il y a des enfants issus de précédentes unions ou s’il y a eu des donations… Le principal à savoir pour réfléchir à tes dernières volontés, c’est que légalement, ton conjoint.e est héritier.ère.
Parent célibataire ou divorcé
Première chose à noter : en cas de divorce, l’ex-conjoint.e n’est plus héritier.ère. Seuls les enfants le sont.
Deuxième chose : si tu souffles ta veilleuse avant ton ex-conjoint.e, il ou elle récupère l’autorité parentale. La situation peut se compliquer si le parent survivant est inapte à exercer cette autorité parentale ou en a été déchu.e. Dans ce cas, retour à la case précédente : la désignation dans ton testament de la ou des personnes à qui tu souhaites confier la tutelle de tes enfant pour éviter le conseil de famille et/ou un placement judiciaire.
En pratique, je le fais comment, mon testament ?
Il existe deux méthodes principales :
La rédaction par écrit en free style depuis chez toi (ou testament olographe)
Avantage : Il suffit d’un papier, d’un stylo, de dater et de signer. Pas besoin de le faire certifier par notaire, c’est donc plus rapide et moins cher.
Inconvénient : Tu acceptes le risque que ce testament puisse être détruit ou perdu, et donc contesté. Et il est possible que tu utilises des clauses incomplètes, incompréhensibles voire illégales.
La rédaction de bon élève chez le notaire (ou testament authentique)
Avantage : Le ou la notaire te conseille sur le contenu, te donne les bonnes formules à employer et surtout, conserve précieusement ton testament.
Inconvénient : Cette prestation possède un coût et une dimension officielle qui peut donner froid dans le dos. Ca y est, tu l’imagines, ton rencard avec le grand barbu pour le dépôt de bilan ?
« Oui, mais avec tous les filets de sécurité nécessaires pour mes rejetons.«
C’est fou ce que ça détend, de faire son testament !
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